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Pourquoi (continuer à) se former en nutrition ?

Dernière mise à jour : 10 oct. 2023

De l’évolution des sciences de la nutrition

Alimentation équilibrée étudiée en formation nutrition

La nutrition s’intéresse aux rôles des nutriments dans l’organisme humain et à leurs interactions, ainsi qu’aux besoins nutritionnels pour maintenir individus et populations en bonne santé.


Voilà une définition bien établie de la nutrition qui demeure encore le seul critère d’enseignement initial pour la majorité des professionnels de santé.


Cependant, la nutrition comprend non seulement :

  • Des évolutions de connaissances et de paradigmes, au sein même de l’étude nutritionnelle des aliments ;

  • Mais aussi, d’autres aspects scientifiques désormais avérés dans l’incidence des maladies chroniques et des atteintes fonctionnelles, au-delà des déséquilibres nutritionnels.

Je vous propose de revenir sur ce pilier de la santé sous-traité tant dans l’enseignement initial des professionnels de santé que dans la mise en place de la Stratégie Nationale de Santé (2018-2022) prévoyant pourtant des engagements politiques pertinents de promotion de la santé (1).


 

SOMMAIRE


Un domaine de santé au carrefour de plusieurs disciplines


Un domaine à part entière de la nutrition


Un domaine qui n’est plus réservé aux spécialistes


L’insatisfaisante réponse en matière d’offre de formation pour les professionnels de santé


 


LA NUTRITION :

Un domaine de santé au carrefour de plusieurs disciplines

La nutrition est une science au carrefour de plusieurs disciplines scientifiques (2) :

  • Les sciences biologiques telles que la physiologie, la biochimie et la microbiologie ;

  • Les sciences environnementales et de la terre, qui vont des modes de production, d’élevage aux techniques agro-alimentaires influençant la composition des aliments ;

  • Les sciences de l’éducation, de la communication et du comportement, dont la psychologie et l’anthropologie voire les sciences sociales et administratives (économie, sociologie, gestion).


La Nutrition dans sa globalité (aspects nutritionnel, sanitaire et comportemental) est aujourd’hui la réponse majeure en termes de prévention mais également d’accompagnement des maladies chroniques et atteintes fonctionnelles selon l’OMS (3).

A l’heure d’internet, le professionnel de santé, premier interlocuteur d’un patient toujours plus informé (ou désinformé) se doit d’acquérir et/ou d’actualiser ses connaissances et compétences notamment en matière :

  • D’évaluation et de personnalisation du conseil nutritionnel ;

  • De risques sanitaires liés à l’alimentation incluant les notions de contaminants chimiques ou de composés agro-industriels sans jamais oublier les risques microbiologiques ;

  • De nouveaux comportements alimentaires médiés par des facteurs sociétaux, économiques, psycho-émotionnels ou encore idéologiques ouvrant la voie à des régimes restrictifs ou à des conduites addictives.



LA SUPPLÉMENTATION :

Un domaine à part entière de la nutrition


La supplémentation désigne désormais une des branches de la nutrition en tant qu’apport de composants nutritionnels ou fonctionnels.


En effet ces dernières années, l’étude de la nutrition a bénéficié sur le plan épidémiologique mais également individuel d’outils d’évaluation objectivés par la biologie nutritionnelle et fonctionnelle.


L’intégration dans sa pratique de nouveaux déterminants de santé ouvre progressivement la porte à des recommandations liées à la supplémentation.


Au niveau mondial, le système d’informations nutritionnelles sur les vitamines et les minéraux (VMNIS), créé en 1991 répond à une des missions de l’OMS consistant à évaluer la situation des populations en matière de micronutriments, ainsi que l’impact des stratégies pour prévenir et combattre ce problème de santé publique. Cela donne lieu à un ensemble de recommandations en termes de nutrition mais également de supplémentation (Guidelines Review Committee GRC, Handbook for guideline development) (4).


En pratique, sur notre territoire, ces recommandations se limitent souvent à des supplémentations très ciblées (supplémentation en folates chez la femme en préconception, supplémentation en vitamine D chez la personne âgée, etc.).


Par ailleurs, que ce soit sur la base d’un bilan personnel ou pour répondre à des recommandations issues des instances sanitaires, la supplémentation nutritionnelle ou fonctionnelle relève de différents domaines de législation, de prescription ou encore de présentation (donc d’allégations).


Les produits de santé relèvent du code de la santé en ce qui concerne le médicament (L5111-2 CSP) (dont les spécialités à base de plantes Dir 2004/24/CE) ou le dispositif médical (dont les CNO compléments nutritionnels oraux).


Les denrées alimentaires relèvent du code de la consommation (et de la DGCCRF pour la notification à l’autorité compétente) en ce qui concerne l’aliment fonctionnel ou le complément alimentaire (Dir 2002/46/CE).


Le terme d’aliment fonctionnel (functional food) autrefois désigné comme « alicament » en France ou par les termes anglais designer food, pharmafood, medifood et vitafood, fait référence aux composants bénéfiques pour la santé (propres ou ajoutés) d’un aliment, autres que ses propriétés nutritionnelles de base. Par extension, il a donné lieu au terme de « nutraceutique » (nutraceutical), qui s’applique à une substance extraite d'un aliment et vendue sous forme de supplément (5, 6).


Le complément alimentaire est aujourd’hui autorisé à comporter (dans un cadre bien précis) :

  • Des nutriments ou des substances à but nutritionnel qui correspondent à une supplémentation nutritionnelle ;

  • Des substances à but physiologique, des phytonutriments ou des préparations à base de plantes qui relèvent d’une supplémentation fonctionnelle.

La nutrition comprend aujourd’hui un levier de supplémentation : nutritionnelle ou fonctionnelle. Le professionnel de santé, selon qu’il soit prescripteur ou non, sera amené à établir ses propres critères de sélection en matière de supplémentation (coût, qualité, biodisponibilité, tolérance, etc.). La formation dans ce domaine devient une nécessité pour tout professionnel de santé.


LA QUALITÉ SANITAIRE DE L'ALIMENTATION :

Un domaine qui n’est plus réservé aux spécialistes


Outre la gestion des risques microbiologiques encore réservée aux domaines agro-industriels et vétérinaires, la réduction des risques environnementaux d’ordre chimique devient aujourd’hui l’affaire de tous les professionnels de santé.


Sur la base des recommandations de l’OMS, du plan de Stratégie nationale de santé (2018-2022) ou encore de celui plus spécifique du Plan National Santé Environnement (PNSE4 2020-2024) tous les voyants sont au vert aujourd’hui pour former un maximum de professionnels de santé sur la qualité sanitaire de l’alimentation.


Ce n’est qu’un des aspects d’un nouveau déterminant de santé, l’exposome, défini par la loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé comme « l’intégration sur la vie entière de l’ensemble des expositions qui peuvent influencer la santé humaine ». Il comprend la totalité des expositions à des facteurs environnementaux (physiques, chimiques, microbiologiques, psycho-sociaux et comportementaux) auquel est soumis un organisme humain de sa conception à sa fin de vie (7).


Comme préconisé par les textes de loi, chaque professionnel de santé doit :

  • Promouvoir l’accès à une alimentation suffisante, saine et durable ;

  • Mieux informer les consommateurs sur la qualité des aliments transformés ;

  • Réduire, notamment chez les femmes enceintes, l’exposition aux substances chimiques notamment celles qualifiées de perturbateurs endocriniens (Stratégie nationale sur perturbateurs endocriniens SNPE2) (8) ;

La formation continue dans le domaine de la nutrition demeure nécessaire et relève d’orientations nationales.


La nutrition est une discipline évolutive, moderne et, surtout, prioritaire afin de répondre aux enjeux actuels des santé publique. Son enseignement, qu’il soit initial ou relevant de la formation continue des professionnels de santé, ne doit plus être restreint ou « poussiéreux ».


LA FORMATION EN NUTRITION :

L’insatisfaisante réponse en matière d’offre de formation pour les professionnels de santé


Dans ce chapitre, je vous fais part de plusieurs rapports ministériels rédigés avant 2009 faisant état de l’inadéquation entre l’offre de formation initiale des professionnels de santé et l’évolution tant des connaissances que du marché lié à la nutrition.


En 2003, un rapport de la commission pédagogique nationale, signalait qu’en matière de nutrition, en dépit de (9) :

  • La généralisation des plans de santé basés sur l’importance de l’alimentation vs l’activité physique pour contrer l’épidémie de maladies chroniques et d’atteintes fonctionnelles ;

  • La diversité et l’évolution des sciences associées à la nutrition ;

  • La complexification des risques environnementaux et agroalimentaires ;

Force est de constater que :

  • La reconnaissance de toute spécialisation en matière de nutrition reste limitée (médecin nutritionniste, diététiciens) ;

  • Malgré son caractère transversal, l’enseignement initial de la nutrition demeure largement inexploité pour les professionnels de santé.

En 2009, un rapport ministériel faisait ce constat (10) :

  • Dans le cursus médical, une dizaine d’items concernent actuellement explicitement la nutrition soit un volume consacré à la nutrition d’une vingtaine d’heures ;

  • Concernant les diététiciens, une mission confiée au Pr Michel Krempf avait permis de confirmer la nécessité de l’évolution de la formation, aussi bien par rapport à l’évolution propre de la discipline que par rapport aux standards européens et internationaux de ces métiers. Outre le fait que la durée actuelle de formation est insuffisante au regard de la complexification croissante des problèmes de nutrition, l’absence d’évolution risque de conduire inéluctablement à l’exclusion des diététiciens français des instances internationales ;

  • Concernant les pharmaciens, une partie non négligeable de l’activité d’officine concerne la vente et le conseil autour de produits qui relèvent du champ de la nutrition. Les pharmaciens constituent un relais qui, sans doute, a été sous-utilisé pour la diffusion et l’accompagnement des différents guides alimentaires du PNNS, mais également en ce qui concerne la supplémentation.

Force est de constater qu’une réflexion approfondie sur ces points, pour un enseignement d’une véritable « nutrition pharmaceutique » devrait être engagée avec la Commission pédagogique nationale des études pharmaceutiques.


Depuis, malgré l’évolution exponentielle du marché du complément alimentaire (les derniers indicateurs du secteur affichent une croissance 1,3% et confirment le positionnement officinal de 51 % comme circuit historique de distribution) (11), l’importance pour cette profession de connaître les problèmes d’interférences (synergie ou antagonisme) avec le médicament, et de pouvoir répondre à des interrogations toujours plus « enrichies » de recherches de renseignements de la part des consommateurs, l’offre de formation initiale demeure inexistante et limitée dans la formation continue (du moins de façon indépendante).


Enfin, en matière de santé environnementale, en dépit :

  • Du lancement en 2019, d’un 4ième plan visant à réduire les impacts des facteurs environnementaux sur la santé (PNSE4 2020-2024), et d’une seconde une consultation publique sur les perturbateurs endocriniens (SNPE2 2019-2022) par les ministères de la Transition écologique et solidaire et celui des Solidarités et de la Santé ;

  • De l’élaboration de nouvelles mesures de la SNPE2 incluant la formation continue des professionnels de santé (action 10) basées sur une approche réaliste des risques sanitaires et des mesures de réduction d’exposition des populations les plus vulnérables notamment en période de périnatalité (femmes enceintes, jeunes enfants) ;

Force est de constater que l’offre de formation en matière de santé environnementale des professionnels de santé n’est, non seulement, pas incluse dans leur cursus initial (y compris pour les sages-femmes) mais fait défaut dans la formation continue.


Espérons que ces rapports et ces nouvelles orientations nationales aient quelque peu été entendus dans l’élaboration et l’application de la réforme « Ma santé 2022 » (« Stratégie de transformation du système de santé » 2018-2022, février 2019) prévoyant, entres autres, d’« adapter les formations aux enjeux du système de santé » et de « repenser la formation continue du professionnel de santé » (12).

CONCLUSION


Au vu des objectifs nationaux de promotion de la santé, de l'évolution des sciences de la nutrition et de l'insuffisance, voire l'absence, de formation initiale, chaque professionnel de santé doit pouvoir se former en nutrition, tout en intégrant les dernières avancées en matière de supplémentation et de qualité sanitaire de l'alimentation (santé environnementale).


Pour cela il existe de nombreux diplômes universitaires dont les DU Nutrition ou DU Micronutrition ainsi que le parcours de formation en Nutrition Fonctionnelle Adaptative®.



Marie-I. LODATO


Formatrice en Santé environnementale et Sciences de la Nutrition

Responsable pédagogique Oreka Formation


(3) WHO- OMS. Global status report on non communicable diseases. 298p. (2014) ISBN : 978 92 4 156485 4.

(9) DEBOUZIE D. Commission pédagogique nationale de la première année des études de santé. Rapport aux Ministres de l’Éducation nationale et de la Santé, 20 juillet 2003.

(10) MISSION LA FORMATION A LA NUTRITION DES PROFESSIONNELS Rapport au Ministre de la santé Présenté par le Pr Ambroise MARTIN AVRIL 2009. https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_A_Martin_formation_nutrition.pdf


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