Où en est l'évaluation des risques de ces médicaments contre l'obésité ?
Comme tout traitement associé à la promesse d’une perte de poids sans effort, l’ouverture de l’innovation pharmacologique des agonistes du récepteur au GLP-1 au marché du surpoids, agite tous les canaux actuels de communication.
Analogues GLP-1 et solutions naturelles de l'effet incrétine
Les incrétinomimétiques correspondent à une classe d’antidiabétiques dont la première commercialisation date de 2008.
Recommandées jusqu’alors dans le diabète de type 2, une des classes d’agonistes du récepteur au GLP-1 est désormais autorisée pour la gestion du poids dans certaines conditions chez les adultes obèses ou en surpoids.
Le sémaglutide, en imitant une hormone naturellement synthétisée par notre intestin a démontré son efficacité sur la perte de poids par le biais de l’augmentation de la sécrétion d'insuline, l’inhibition de la libération de glucagon, de la vidange gastrique et la réduction de l'apport alimentaire par effet sur l'appétit.
Nombre d’entre vous, à l’officine ou en entretiens individuels, sont confrontés aux interrogations légitimes des patients :
Avons-nous assez de recul sur les effets à long terme de ces molécules ?
Quid de l’effet à l’arrêt du traitement ?
Et finalement sans remettre en question la prise de ces médicaments dans le cadre d’une prescription bien menée, si on s’interrogeait simplement sur les conditions physiologiques et non médicamenteuses d'un effet incrétine réussi ?
▶️ Vous trouverez les réponses à ces questions dans cet article et, si vous souhaitez en apprendre plus sur le sujet, vous pouvez également rejoindre notre formation sur les dysfonctionnements immunologiques et métaboliques.
SOMMAIRE
NOUVEAUX TRAITEMENTS CONTRE L'OBESITE ET LE DIABETE DE TYPE 2 : COMMENT ÇA MARCHE ?
Le GLP-1 natif
Les incrétines sont des hormones sécrétées par les cellules intestinales endocrines suite à une prise alimentaire.
Deux incrétines physiologiques existent :
Le Glucose dependent Insulinotropic Polypeptide (GIP) sécrété par les cellules K du duodénum.
Le Glucagon-like Peptide-1 (GLP-1) de nature polypeptidique sécrété par les cellules L du jéjunum et de l’iléon.
Le GLP-1 est dégradé rapidement par la dipeptidyl peptidase-4 (DPP-4)*, enzyme transmembranaire, ubiquitaire exprimée dans de nombreux tissus à la surface des cellules épithéliales, endothéliales et du système immunitaire.
*Les inhibiteurs de la DPP-4 ou gliptines, constituent une autre classe d’antidiabétiques oraux représentés en France par la saxagliptine, la sitagliptine et la vildagliptine.
Le GLP-1 est un peptide produit par le clivage du proglucagon, principalement synthétisé dans les cellules L de la muqueuse intestinale mais également les cellules α des îlots pancréatiques et les neurones du noyau du tractus solitaire.
Le GLP-1 est une hormone physiologique exerçant plusieurs effets sur la régulation du glucose et de l’appétit, ainsi que sur le système cardiovasculaire ou encore le métabolisme osseux.
La régulation de l’homéostasie glucidique liée au GLP-1 par l'intermédiaire de récepteurs GLP-1R situés dans le pancréas et le cerveau passe par :
La stimulation de la sécrétion d’insuline (hypoglycémiante) dépendante du glucose par les cellules β,
L’inhibition parallèle de la sécrétion post-prandiale de glucagon (hyperglycémiante) par les cellules α au niveau pancréatique, permettant ainsi :
La diminution de la néoglucogénèse hépatique (bande à 3 temps de l'hyperglycémie qui par effet rebond alimente à nouveau un état hyperglycémique et la glucotoxicité associée) ainsi que la libération des acides gras libres (entretenant la lipotoxicité).
L’augmentation de la sensibilité à l’insuline et l’augmentation de la captation du glucagon au niveau musculaire.
Le ralentissement de la vidange et de la sécrétion d’acide gastrique amenant à diminuer le pic glycémique post-prandial (premier niveau de sensation de satiété).
La diminution de l’appétit et l’augmentation de la satiété par un effet direct au niveau du système nerveux central.
Les incrétines sont les garde-fous de l'effet up and down du couple insuline/glucagon.
Cette rétroaction mutuelle protectrice en situation d'alimentation saine peut, sous certaines conditions inadéquates, devenir une plateforme d'amplification des phénomènes de glucotoxicité et de la lipotoxicité.
En modulant ce risque et grace à ses capacités de protection directe (augmentation de la prolifération des cellules β et réduction de leur apoptose), le GLP-1, produit de façon appropriée, préserve la fonction pancréatique et évite les dysfonctions métaboliques associées notamment d'ordre hépatiques.
Un effet incrétine bien conduit est le fruit d’une somme de conditions nutritionnelles et fonctionnelles non dérégulées qui amène à cette mécanique protectrice.
Les analogues médicamenteux du GLP-1
Les analogues stables du GLP-1, représentés en France par le sémaglutide, le liraglutide et le dulaglutide sont des peptides à homologie structurelle avec le GLP-1 natif produit par la technique de l'ADN recombinant sur des cellules de Saccharomyces cerevisiae.
Suite à des réarrangements au niveau des séquences d’acides aminés ou à l’ajout d’une chaîne d’acide gras, ils sont devenus insensibles à l’action de la DPP-4.
Comme indiqué dans ce tableau, la majorité des analogues GLP-1 sont indiqués en cas de diabète de type 2 insuffisamment contrôlé :
Homologie GLP-1 | Dénomination commerciale | Indications | Dose / Stylo prérempli | |
---|---|---|---|---|
Liraglutide | 97 % | Saxanda, Victoza | Diabète de type 2 insuffisamment contrôlé |
|
Sémaglutide | 94 % | Ozempic | Diabète de type 2 insuffisamment contrôlé | Dose recommandée 1 fois par semaine 0.25/0.50 à 1 mg Des doses plus élevées peuvent être prescrites jusqu’à 2 mg |
Sémaglutide | 94 % | Wegovy | Obésité ou surpoids, IMC initial supérieure ou égale à 35 kg/m2, chez les personnes entre 12 et 65 ans | Dose recommandée 1 fois par semaine 2.4 mg (dose augmentée progressivement sur un laps de temps de 16 semaines) |
Dulaglutide | 90 % | Trulicity | Diabète de type 2 insuffisamment contrôlé |
|
Exénatide | 53 % | Byetta | Diabète de type 2 insuffisamment contrôlé | Arrêt commercialisation 29 nov 2024 |
Wegovy : Indications, prescriptions et remboursement
Le Wegovy est le premier sémaglutide indiqué, sous conditions, dans le contrôle du poids chez des adultes et des adolescents (à partir de 12 ans) présentant une obésité ou un surpoids.
Selon les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), il s'agit d'un traitement de seconde intention dans la prise en charge de l'obésité, lorsque le patient reste en échec sur la réduction du poids malgré la mise en place des changements du mode de vie et une prise en charge nutritionnelle adaptée.
L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a restreint les conditions de prescription de ce médicament afin de réduire le risque de mésusage.
La prescription initiale doit être réalisée par un médecin spécialiste en endocrinologie-diabétologie-nutrition ou titulaire de la formation spécialisée transversale « Nutrition appliquée ».
Les renouvellements peuvent être réalisés par les médecins généralistes.
WEGOVY n'est pas remboursable dans le droit commun à la date du 10 octobre 2024.
SÉMAGLUTIDE À OBJECTIF DE PERTE DE POIDS : EFFETS INDÉSIRABLES ET RISQUES ASSOCIÉS
En dehors de réaction au site d'injection (les excipients des stylos injecteurs sont de l'acide chlorhydrique, des phénols, du propylèneglycol) ou de rares réactions anaphylactiques, sont notifiés dans les effets indésirables à risques graves des :
Affections gastro-instestinales
Des effets indésirables fréquents
Dans la longues listes des effets indésirables d'ordre digestif sont mentionnés comme :
Très fréquents (30 % des cas) : vomissements, diarrhées, constipation, nausées, douleurs abdominales,
Fréquents (1 à 10 % des cas) : gastrite, RGO, dyspepsie, éructation, flatulence, distension abdominale.
Ils ont tendance à diminuer après quelques semaines de traitement et en respectant les règles d'administration progressive des doses.
Des risques faibles mais pouvant être graves
Dans de rares cas sont établis les risques de :
De pancréatites aiguës,
D'affections hépato-biliaires (majoritairement des cholestases et lithiases biliaires),
D'occlusions intestinales et de gastroparésies (1, 2).
Les recommandations préventives associées à ce surrisque sont d'éviter la prescription ou d'arrêter le traitement en cas :
Antécédent de pancréatite
Calculs biliaires ou taux de triglycérides sanguins très élevés
Consommation excessive d'alcool
Maladie rénale grave
Utilisation d’autres médicaments associés à la pancréatite
Elévations anormales de lipase et amylase.
Affections cardiaques
Les effets indésirables des agonistes du récepteur du GLP-1 font état :
D'une augmentation de la fréquence cardiaque,
D'hypotension et d'hypotension orthostatique.
À long terme, le sémaglutide, réduit le risque d'événements cardiovasculaires indésirables majeurs chez les personnes en surpoids ou obèses, mais les effets de ce médicament sur les résultats chez les patients atteints d'une maladie cardiovasculaire athéroscléreuse et d'une insuffisance cardiaque sont inconnus (3).
Affections du système nerveux
Des effets indésirables
Les effets indésirables identifiés sont :
Des maux de tête
De possibles vertiges
Il est établi que, par l'intermédiaire de plusieurs voies, le sémaglutide administré par voie périphérique pourrait avoir un impact sur la réactivité dopaminergique de l'aire tegmentale ventrale.
Retour sur les risques suicidaires et d'automutilation initialement évoqués
Suite au signalement de cas de pensées suicidaires et de pensées d'automutilation, le comité d'évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) a analysé une large base de données examinant l’incidence des pensées suicidaires chez les patients en surpoids et atteints de diabète sucré de type 2 traités par sémaglutide ou d’autres médicaments agonistes des récepteurs non GLP-1 pour le diabète ou le surpoids.
L'examen débuté en juillet 2023, n’a trouvé aucune association causale entre l’utilisation de sémaglutide et les pensées suicidaires.
Le comité d'évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC), après avoir élargi les données disponibles aux autres molécules, n'a pas établi de lien de causalité entre la prise de médicaments de la classe des analogues de GLP-1 et le risque d’idées suicidaires et d’automutilation.
Une autre étude a été menée par l'EMA , basée sur des dossiers médicaux électroniques, qui a examiné le risque d'événements liés au suicide et à l'automutilation chez les personnes atteintes de diabète sucré de type 2.
À nouveau, les résultats n'ont pas soutenu une association causale entre l'utilisation d'agonistes du récepteur GLP-1 et ce risque.
Des risques à très long terme encore insuffisamment étudiés
Dans le système nerveux, le GLP-1 et leurs analogues sont globalement associés à la réduction de la neuroinflammation, de la neurotoxicité ainsi qu'à la protection des neurones dopaminergiques.
Sur la base de modéles animaux, les preuves accumulées issues des études précliniques suggèrent que le sémaglutide pourrait être un agent neuroprotecteur prometteur en matière de prévention des maladies d'Alzheimer ou de Parkinson (4).
Néanmoins, l'augmentation de l'insulinosécrétion se double dans le métabolisme pancréatique d'une autre hormone appelée l'amyline.
Co-sécrétées dans un rapport de 100:1, insuline et amyline présentent les mêmes propriétés en matière de régulation de ralentissement de la vidange gastrique ou encore de la réduction de la prise alimentaire.
L'amyline est également associée à la réduction de la résorption osseuse et par ce caractère là, présente une forte capacité à la constitution de fibres amyloïdes.
Selon certains travaux, les agrégats d’amyloïdes liés à l’amyline sont trouvés dans les ilôts de Langherans du pancréas de plus de 90 % des patients atteints de diabète de type pouvent induire la mort cellulaire par apoptose.
L’amyline peut également franchir la barrière hémato-encéphalique et atteindre différents sites du système nerveux central.
Les résultats des études sont encore contradictoires mais les agrégats de substance amyloïde associés à l'hyperamylémie pourraient induire une cytotoxicité conduisant à certaines maladies parmi lesquelles la maladie d’Alzheimer (5).
Les données sur la cosécrétion d'amyline induite par les analogues de GLP-1 sont donc à ce jour insuffisantes sur le long terme en matière de risque neurodégénératif.
D'autant que les recherches cliniques évoquent déjà des traitements « GLP1 plus » allant au-delà des analogues de GLP1 par l'activité combinée du GLP1 avec des activités complémentaires telles que celles du GIP, du glucagon mais également de l'amyline (sous le terme d'amycrétine) (6).
Génotoxicité et reprotoxicité
Retour sur les risques de cancer initialement évoqués
Les données précliniques issues des études conventionnelles de pharmacologie de sécurité, toxicologie en administration répétée ou génotoxicité avaient soulevé un risque faible de cancer :
De la thyroïde (par effet sur les cellules C notamment de l'amyline),
Du pancréas.
Les tumeurs non létales des cellules C de la thyroïde observées chez les rongeurs constituent un effet spécifique à la classe des agonistes des récepteurs au GLP-1.
Lors d’études de carcinogénicité sur 2 ans chez le rat et la souris, le sémaglutide a provoqué des tumeurs des cellules C de la thyroïde à des expositions cliniquement significatives.
Les tumeurs des cellules C chez les rongeurs sont dues à un mécanisme non génotoxique, spécifique, médié par les récepteurs du GLP-1, auquel les rongeurs sont particulièrement sensibles.
La pertinence de ces résultats relatifs au risque de cancer des cellules C de la thyroïde pour l’homme est considérée comme faible mais ne peut pas être complètement exclue.
De même, l’ANSM a réalisé en 2016 une étude pharmaco-épidémiologie à partir des données du SNIIRAM (Système national d’Information Inter-Régimes de l’Assurance maladie) dont le résultat « ne fournit pas d’argument en faveur d’un risque spécifique des incrétinomimétiques vis-à-vis du cancer du pancréas ».
Cette étude a inclus plus de 1,3 millions de sujets diabétiques de type 2, suivis pendant 3,7 ans en moyenne (2010-2013), dont 41,1 % ont reçu des gliptines et 7,2 % des analogues du GLP-1.
Selon les résultats, le risque de survenue du cancer du pancréas apparaît plus élevé de 30 % chez les sujets exposés aux gliptines que chez les sujets non exposés, en particulier durant la période d'initiation de traitement.
Cette augmentation du risque est retrouvée avec les autres antidiabétiques oraux (metformine et sulfamides notamment), de l'ordre de 20 à 40 %, mais pas avec les analogues du GLP-1.
En matière de risque de cancer du pancréas, les résultats actuels ne soulignent pas de risque spécifique mais l’ANSM précise qu’un « suivi plus long sera nécessaire pour estimer le risque à plus long terme».
Risques importants de reprotoxicité et précautions à prendre
Lors d’études du développement embryo-fœtal chez le rat, le sémaglutide a entraîné une embryotoxicité à des expositions inférieures aux niveaux cliniquement significatifs.
Le sémaglutide a entraîné une nette réduction du poids maternel et une diminution de la croissance et de la survie embryonnaires.
Même si il existe des données limitées sur l’utilisation du sémaglutide chez la femme enceinte, par précaution :
L’utilisation d’une contraception pendant le traitement par le sémaglutide est recommandée chez les femmes en âge de procréer.
Le sémaglutide ne doit donc pas être utilisé pendant la grossesse.
En cas de projet de grossesse ou en cas de grossesse, le traitement par le sémaglutide doit être interrompu. Le sémaglutide doit être arrêté au moins 2 mois avant un projet de grossesse en raison de sa longue demi-vie.
Autres risques chez les patients diabétiques
Chez les patients diabétiques, existent :
Un risque faible d'hypoglycémie avec le sémaglutide, mais le risque est accru lorsqu'il est associé à une sulfonylurée et/ou à une insulinothérapie.
Plusieurs experts conseillent de réduire la dose de sulfonylurée et d'analogues de l'insuline à courte et à faible durée d'action avant ou pendant la titration du traitement par agonistes des récepteurs au GLP-1, afin de réduire le risque d'hypoglycémie.
Un risque accru de rétinopathie.
TRAITEMENTS CONTRE L'OBÉSITÉ ET LE SURPOIDS : ET APRÈS ?
Le risque de reprise de poids post traitement
À ce jour, plusieurs essais cliniques ont montré une reprise de poids après l’arrêt des médicaments GLP-1.
Le sémaglutide a démontré des effets cliniquement importants sur la perte de poids chez les patients atteints de diabète de type 2 ainsi que chez les patients en surpoids/obésité et non diabétiques (7).
Lors du suivi le plus long, 33,4 % des participants randomisés pour recevoir du sémaglutide ont obtenu une perte de poids ≥ 20 %, contre 2,2 % pour le placebo (RR 15,08, IC à 95 % 9,31 à 24,43).
L'estimation de la potentielle reprise de poids après arrêt traitement a été abordée dans l'extension de l'essai STEP 1, sur la base d'essais contrôlés randomisés de participants en surpoids/obésité et non diabétiques à 2,4 mg de sémaglutide sous-cutané une fois par semaine par rapport au placebo, et justifiant d'un suivi d'au moins 68 semaines.
Le critère d'évaluation principal était un changement du poids corporel relatif entre la ligne de base et le suivi le plus long (8).
Le résultat fait état d'une reprise moyenne de deux tiers de la perte de poids antérieure, avec des changements similaires dans les variables cardiométaboliques, un an après l'arrêt de l'administration hebdomadaire de 2,4 mg de sémaglutide sous-cutané et d'une intervention sur le mode de vie.
Près de la moitié des participants du groupe sémaglutide (48,2 %) présentaient toujours une perte de poids cliniquement significative de 5 % ou plus par rapport à la ligne de base à la semaine 120, bien que cette proportion représente une baisse substantielle par rapport à celle initialement obtenue à la fin de 68 semaines de traitement (86,4 %).
Approches nutritionnelles pour un effet incrétine fonctionnel
Même si à ce jour aucun schéma thérapeutique ou diététique ne garantit le maintien du poids après l'arrêt du traitement ou la non reprise de poids, cet article nous interroge naturellement sur la physiologie de l'effet incrétine mimé par ces analogues de GLP-1 pour cibler un effet agoniste des récepteurs GLP-1R.
Si il est admis aujourd'hui que l'effet incrétine est réduit chez le patient diabétique, les chercheurs ne savent pas encore si il s'agit d'une cause ou d'une conséquence du diabète de type 2.
Au niveau intestinal, le GLP-1 est sécrété par les cellules L entéroendocrines situées dans le jéjunum distal, l'iléon et le côlon en réponse à l'ingestion de nutriments et à la stimulation neuroendocrine.
Sa fonctionnalité dépend de plusieurs étapes successives :
Sa sécrétion, dépendante d'un ensemble de récepteurs impliqués dans la perception des principales saveurs (sucrées mais également umami ou amères) ainsi que la perception du gras,
Sa transformation en formes actives (GLP-1 amides) ainsi que l'activation des récepteurs et des voies de signalisation cibles (GLP-1 R) médiées par des seconds messagers intracellulaires (principalement voies AMPc/PKA, ainsi que PI3K/Akt),
Sa durée d’action relativement éphémère, (1 à 2 minutes dans le système circulatoire dans les conditions physiologiques typiques déjouées dans le modèle pharmacologique). Par la suite, le GLP-1 subit une dégradation enzymatique facilitée par la dipeptidyl peptidase IV (DPP-4), entraînant la perte de son efficacité biologique.
L'homéostasie endocrine des incrétines constitue un maillon important mais non suffisant à la régulation des troubles métaboliques (aspects génomiques et mitochondriaux à prendre également en considération) mais de nombreuses études sur ce système hautement conservé chez les mammifères permet désormais de lister les déterminants de santé d'un "bon effet incrétine" (9, 10, 11, 12).
Déterminants nutritionnels et fonctionnels de l'effet incrétine (Lodato, 2024)
Régulateurs et étapes de l’effet incrétine | Aliments et déterminants de la lumière intestinale en lien avec l’alimentation | Aliments et déterminants de la lumière intestinale en lien avec l’alimentation | Déterminants fonctionnels |
Direct | Indirect | ||
Sécrétion du GLP-1 | Aliments sucrés (TAS1R2/TAS1R3), ou umami (TAS1R1/TAS1R3), à principes amers (TAS2Rs)
| AGCC (fibres alimentaires, amidons résistants), Dérivés indoles (légumes brassicacées) Capsaïcine (piments) et gingérol (gingembre) | Intégrité structurelle et fonctionnelle (hormones thyroïdiennes, microbiote)
Cohérence du système neurovégétatif notamment de la balance du parasympathique (nerf vague)
Régulation de la somatostatine (L arginine, activité physique) |
Sécrétion du GLP-1 | AG (GPRs) dont : AG à chaînes longues particulièrement l’acide oléique (huile d’olive) et son dérivé endocannabinoïde OEA (GPR119) TCM Triglycérides à chaînes moyennes issus des produits issus de la filière laitière caprine, ou dérivés de coco, AG à chaînes courtes notamment le propionate (fromage à pâtes pressées) (FFAR ou GPR40 ET 120) | Acides biliaires (TGR5) (LCA) | |
Sécrétion du GLP-1 | Glutamine dans une moindre mesure | GABA, glycine | |
Inhibition des DDP IV | Peptides bioactifs inhibiteurs des DPP-IV (dérivés des produits laitiers fermentés, di et tripeptides issus du collagène) |
| |
Activation des voies de signalisation GLP1R | Magnésium (AMPc/PKA) Inositols (PI3K/Akt) Ca2+
| Equilibre électrolytique |
AG Acide gras ; TCM Triglycérides à chaînes moyennes ; OEA Oleoyléthanolamide ; LCA Acide lithocholique ; GPR, G protein-coupled receptor ; FFAR free fatty acids receptor ; TAS1R, taste receptor type 1 ; TAS2R, taste receptor type 2 ; TRPV transient receptor potential vanilloid ; DPP IV Dipeptidyl peptidase IV ; AMPc adénosine monophosphate cyclique ; PKA proteine kinase A ; PIK3 phophoinositide 3-kinase ; Akt proteine kinase B
Références générales :
Vous souhaitez aller plus loin dans les solutions naturelles d'un effet incrétine fonctionnel ?
POINTS À RETENIR SUR LES TRAITEMENTS CONTRE L'OBÉSITÉ (SÉMAGLUTIDE)
Les nouveaux traitements anti-obésité sont des analogues du GLP-1, une hormone naturellement synthétisée par l'intestin chargée entre autre de la régulation du métabolisme du glucose.
Les mécanismes agonistes des récepteurs cibles au GLP-1 "boostent"la perte poids par des effets combinés de régulation endocrine (augmentation de l'insulinosécrétion, réduction de la sécrétion de glucagon, baisse de la vidange gastrique) et de modulation centrale à la baisse de la prise alimentaire.
Ces traitements sont à l'origine de fréquents effets indésirables notamment d'affections gastro-intestinales mineures (nausées, vomissement, RGO etc.) ou d'augmentation de la fréquence cardiaque.
Des risques plus faibles mais plus graves demeurent : le risque de pancréatites aiguës, d'affections hépatobiliaires cholestasiques ou plus rarement de cancer des cellules C de la thyroïde. Le risque reprotoxique est bien établi et doit donner lieu à des précautions spécifiques.
L'étude des bases de données actuelles par les autorités compétences semble écarter les risques de pensées suicidaires, d'automutilation ou de cancers du pancréas à moyen terme. Les risques à long terme sont encore à l'étude.
À ce jour, on estime qu'en moyenne, les personnes non diabétiques en surpoids/obésité ayant suivi un protocoles de 2.4 mg de sémaglutide par semaine pendant au moins 68 semaines et d'une intervention sur leur mode de vie, reprendront les 2/3 de leur poids perdu après l'arrêt du traitement.
Ces traitements sont basés sur la reproduction et l'amplification d'un phénomène physiologique appelé l'effet incrétine qui est le fruit physiologique de mesures alimentaires et fonctionnelles bien documentées à ce jour (Voir le tableau "Déterminants nutritionnels et fonctionnels de l'effet incrétine" ci-dessus).
Marie-I. LODATO
Formatrice en Médecine environnementale et de Nutrigénomique appliquée
Co-Responsable pédagogique Oreka Formation
Co-Conceptrice de la Nutrition Fonctionnelle Adaptative
1- Mohit Sodhi et al. Risk of Gastrointestinal Adverse Events Associated With Glucagon-Like Peptide-1 Receptor Agonists for Weight Loss. 2023;330(18):1795-1797. doi:10.1001/jama.2023.19574
2- Walter Masson, Martín Lobo, Leandro Barbagelata, Augusto Lavalle-Cobo, Juan P. Nogueira,
Acute pancreatitis due to different semaglutide regimens: An updated meta-analysis, Endocrinología, Diabetes y Nutrición, Volume 71, Issue 3, 2024, Pages 124-132, ISSN 2530-0164, https://doi.org/10.1016/j.endinu.2024.01.001.
3- Deanfield J, Verma S, Scirica BM, Kahn SE, Emerson SS, Ryan D, Lingvay I, Colhoun HM, Plutzky J, Kosiborod MN, Hovingh GK, Hardt-Lindberg S, Frenkel O, Weeke PE, Rasmussen S, Goudev A, Lang CC, Urina-Triana M, Pietilä M, Lincoff AM; SELECT Trial Investigators. Semaglutide and cardiovascular outcomes in patients with obesity and prevalent heart failure: a prespecified analysis of the SELECT trial. Lancet. 2024 Aug 24;404(10454):773-786. doi: 10.1016/S0140-6736(24)01498-3.
4- Meca AD, Boboc IKS, Mititelu-Tartau L, Bogdan M. Unlocking the Potential: Semaglutide's Impact on Alzheimer's and Parkinson's Disease in Animal Models. Curr Issues Mol Biol. 2024 Jun 13;46(6):5929-5949. doi: 10.3390/cimb46060354.
5- Mietlicki-Baase EG. Amylin in Alzheimer's disease: Pathological peptide or potential treatment? Neuropharmacology. 2018 Jul 1;136(Pt B):287-297. doi: 10.1016/j.neuropharm.2017.12.016.
7- Moiz, Areesha et al. Long-Term Efficacy and Safety of Once-Weekly Semaglutide for Weight Loss in Patients Without Diabetes: A Systematic Review and Meta-Analysis of Randomized Controlled Trials. American Journal of Cardiology. 2024; 222, 121 - 130.
8- Wilding JPH, Batterham RL, Davies M, Van Gaal LF, Kandler K, Konakli K, Lingvay I, McGowan BM, Oral TK, Rosenstock J, Wadden TA, Wharton S, Yokote K, Kushner RF; STEP 1 Study Group. Weight regain and cardiometabolic effects after withdrawal of semaglutide: The STEP 1 trial extension. Diabetes Obes Metab. 2022 Aug;24(8):1553-1564. doi: 10.1111/dom.14725.
9- Zheng, Z., Zong, Y., Ma, Y. et al. Glucagon-like peptide-1 receptor: mechanisms and advances in therapy. Sig Transduct Target Ther 9, 234 (2024). https://doi.org/10.1038/s41392-024-01931-z
10- Diakogiannaki E, Gribble FM, Reimann F. Nutrient detection by incretin hormone secreting cells. Physiol Behav. 2012 Jun 6;106(3):387-93. doi: 10.1016/j.physbeh.2011.12.001.
11- Baggio LL, Drucker DJ. Biology of incretins: GLP-1 and GIP. Gastroenterology. 2007 May;132(6):2131-57. doi: 10.1053/j.gastro.2007.03.054.
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