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Qu'est-ce que la Supplémentation?


La supplémentation est définie comme une des disciplines de la nutrition, relative à l'apport supplémentaire de nutriments ou de composés bioactifs.


La nutrition dans sa globalité (aspects nutritionnel, sanitaire et socio-comportemental) est aujourd’hui reconnue par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) comme la principale réponse en termes de prévention mais également d’accompagnement des pathologies multifactorielles à savoir les maladies chroniques et atteintes fonctionnelles.


Ce constat fait suite à la définition adoptée lors du Sommet mondial de l'alimentation en 1996 :


"La sécurité alimentaire existe lorsque tous les êtres humains ont, à tout moment, un accès physique et économique à une nourriture suffisante, saine et nutritive, leur permettant de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine et active" (F.A.O Food and Agriculture Organization of the United Nations), (1).


Ainsi, plus que jamais, nutrition moderne et supplémentation sont indissociables mais il existe encore des voiles de malentendus, y compris dans le monde de la santé, et je vous propose de les lever dans cet article.


C'est également l'occasion pour moi de réaffirmer la triade de la santé qui structure les modules d’Oreka Formation de façon équivalente via la Nutrition Fonctionnelle Adaptative®, à savoir : la Nutrition, la Supplémentation et la Santé environnementale.


 

SOMMAIRE





▻ Le médicament

▻ Le complément alimentaire

▻ Les bases sur lesquelles reposent les critères de mise en place d'une supplémentation

▻ Les recommandations nutritionnelles

▫︎ En France

▫︎ Au niveau mondial

▫︎ Quelques exemples de recommandations en matière de supplémentation

▻ Les valeurs biologiques cibles



 

NUTRITION, MICRONUTRITION, SUPPLÉMENTATION


Petit retour en arrière et enjeux de demain concernant la nutrition moderne


Si l’importance de l'alimentation avait déjà été pressentie dès l’Antiquité (Hippocrate) et le Moyen-Âge (Sainte Hildegarde, Paracelse), les prémices de la nutrition moderne ont émergé dans un contexte de restrictions liées aux différentes guerres avec notamment la constitution de la « ration de combat ».


En amont, et dans le même temps, la description des carences qualitatives d’origine alimentaire et de leurs signes cliniques a été prépondérante dans l’élaboration de la nutrition scientifique.


En France, les travaux de Lucie Randoin (1888-1960), Jean Trémolières (1913-1976), Hugues Gounelle de Pontanelle (1903-2001), etc. se sont particulièrement attachés à décrire les maladies non infectieuses liées à des états carentiels notamment vitaminiques.


C’est le début de l’épidémiologie des maladies d’origine alimentaire et de la réalisation de suivis nutritionnels sur le plan populationnel à travers des enquêtes observationnelles alimentaires au regard de données cliniques et biologiques.


La nutrition moderne est fondée sur une approche de santé publique, à savoir cerner un risque pour le plus grand nombre, et non de façon individuelle.

Dans la même optique, se généralisera la notion de normes, sur une base statistique et épidémiologique, en termes de recommandations en apports nutritionnels mais également, avec l’évolution de la médecine moléculaire, en termes de cibles biologiques à atteindre.


Fort d’arguments scientifiques et cliniques visant à réduire le risque de maladies liées à un état carentiel, la nutrition moderne s’est développée à travers une constellation de médecins et de chercheurs mais également d’épidémiologistes et de spécialistes en sciences sociales et économiques (2).


Le défi que la nutrition moderne allait rencontrer des décennies plus tard, relevait de l’émergence pharmacologique comme outil principal de la pratique de la médecine générale, entraînant un désintérêt patent de la profession pour la nutrition moderne.


Mais aussi du besoin de développement d'une approche individuelle en raison :

  • Du changement majeur des habitudes alimentaires avec la multiplication de régimes restrictifs choisis, non plus sur le plan strictement calorique, mais par éviction d’aliments majeurs, socles de l'élaboration des repères de la nutrition moderne.

  • Du changement environnemental incroyablement rapide à l’échelle de l’humanité, passant de la prépondérance de l'exposome microbiologique (ère de maladies infectieuses) à celui d'un exposome chimique écrasant (ère des maladies environnementales) supposant de nouvelles connaissances en termes de prévention croisée entre nutrition et environnement.


Définitions de la nutrition et de ses corollaires


La nutrition est donc une science au carrefour de plusieurs disciplines, y compris sociales, qui étudie, pour un organisme donné, l’ensemble des processus d’assimilation, de dégradation et de transformation des substances nécessaires à assurer ses fonctions essentielles (fonctions vitales, croissance, reproduction etc.).


Pour un organisme animal, la nutrition moderne s’intéresse :

  • À l’apport desdites substances provenant des aliments (supposant l’étude de la physiologie de la nutrition ou comment l’organisme opère la transformation des aliments à travers des processus métaboliques) ou non (émergence du concept de supplémentation nutritionnelle),

  • Aux besoins nutritionnels subséquents nécessaires au maintien des individus et populations en bonne santé.

  • Aux rôles des nutriments dans l’organisme au niveau de mécanismes biochimiques cellulaires, et les conséquences des déséquilibres de l’homéostasie cellulaire sur l’ensemble de l’organisme en question (émergence du concept de micronutrition).

En France, dans la lignée des travaux du Dr Catherine Kousmine (1904-1992) ou encore de Linus Pauling (Prix Nobel de Chimie en 1954), le terme de micronutrition s’est généralisé dans les années 1990 par le biais de médecins tels que les Dr Christian Leclerc ou Claude Lagarde, désireux de développer une médecine nutritionnelle (nutritional medicine) (3).


Cette dernière était destinée à compléter, y compris de façon individuelle (mais sans "se substituer à"), une médecine humaine moderne devenue amnésique des travaux de ses pères sur les liens entre nutrition et santé.


À noter que la médecine vétérinaire n’a jamais connu cette exclusivité allopathique, tant dans l’enseignement largement consacrée à la qualité alimentaire et à la nutrition y compris la supplémentation, que dans sa pratique fortement « contrainte » d’enjeux économiques.


Autre remarque, il est à déplorer que l’objectif initial poursuivi par les fondateurs passionnés de la médecine nutritionnelle ait été dévoyé, à certains égards, par d’autres protagonistes relevant d’une médecine anti-âge, élitiste et commerciale. Gageons que le retour aux fondamentaux et urgences actuelles de la médecine environnementale ne remettent les objectifs de santé publique au centre des priorités de santé et de soins.


Par ailleurs, conscient que la micronutrition est un terme restrictif, non reconnu officiellement, ni par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ni par la Haute Autorité de santé (HAS), Oreka Formation a conçu ses programmes et stratégies d'accompagnement sur le terme de supplémentation.


La supplémentation est, en effet, le terme de référence utilisé dans la littérature scientifique en ce qui concerne l'utilisation des suppléments nutritionnels (nutritional ou dietary supplements, nutrients supplementation) et fonctionnels par l'apport de composés bioactifs reconnus comme bénéfiques pour la santé (botanical, herbs supplements, botanical compounds, amino acids supplements etc.).




LA SUPPLÉMENTATION POUR LES NULS


La supplémentation désigne une des branches de la nutrition en tant qu’apport de substances nécessaires à l’organisme par :

  • Des composés nutritionnels (approche la plus ancienne fondée sur la prévention et/ou l’établissement d’états déficitaires ou carentiels),

  • Des composés fonctionnels à savoir bioactifs (approche plus récente fondée sur la connaissance des fonctionnements moléculaires, cellulaires et physiologiques d’un organisme).

Ce marché a été massivement construit en Amérique du Nord par l'industrie alimentaire et pharmaceutique au cours des années 1980, alors que la tendance a été observée en Europe depuis les années 1990 comme évoqué plus haut.



La supplémentation : pour qui, par qui ?


Les objectifs de la supplémentation comprennent un volet préventif et d'accompagnement de patients souffrant de pathologie.


La supplémentation nutritionnelle s'inscrit à l’échelle des populations et des individus a fortiori en cas de besoins spécifiques : grossesse, allaitement, régimes restrictifs, activité sportive, profils de malassimilation, vieillissement, maladies chroniques etc.


La supplémentation fonctionnelle implique une connaissance plus approfondie des mécanismes physiopathogéniques.


Comme évoqué plus tard dans cet article, en tant que spécialité des sciences de la nutrition, le conseil en supplémentation devrait figurer dans l’enseignement initial et la formation continue de tous professionnels et praticiens de santé en charge d’un conseil nutritionnel et/ou d’accompagnement de pathologies.



La supplémentation : avec quoi ?


La supplémentation au sens large relève de 2 cadres réglementaires distincts : le médicament et le complément alimentaire (ou supplément).


Le médicament


Le prescripteur est un médecin (ex : la classe A11 pour les vitamines ou A12 pour les minéraux selon le répertoire des spécialités pharmaceutiques, dans la liste ATC Anatomical Therapeutic and Chemical ou encore les médicaments à base de plantes).


Les sages-femmes peuvent également prescrire, à la femme, à l'enfant et à l'homme partenaire de la femme, les médicaments figurant par classes thérapeutiques dans les listes figurant dans les tableaux I, II et III de l'annexe 41-4 (dont les vitamines comme l'acide folique et les sels minéraux) (4).


L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) est l’acteur public qui permet, au nom de l’État, l’accès aux produits de santé en France et qui assure leur sécurité (essais cliniques, mise sur le marché, pharmacovigilance, indications, contre-indications, interactions, effets indésirables etc.).


Ces formes peuvent correspondre aux apports quotidiens recommandés ou parfois plus, sous forme orale ou parfois injectable (ex : ampoules de 1000 µg de vitamine B12 GERDA©).


Relevant du Code de la Santé Publique en ce qui concerne le médicament (L5111-2 CSP) (dont les spécialités à base de plantes Dir 2004/24/CE) ou le dispositif médical, ces produits de santé peuvent être présentés comme toute substance ou composition possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines.


Bénéficiant de ce cadre sécuritaire ainsi que d’un caractère économique, cette forme de supplémentation souffre néanmoins du manque de formation spécifique de la part de certains prescripteurs sur les notions de :

  • Biodisponibilité,

  • Tolérance (exemple du sulfate de fer TARDYFERON©),

  • Critères de qualité, notamment pour les populations vulnérables telles que les femmes enceintes (en plus des excipients à effets notoires bien établis, défaut de prévention vis-à-vis d'une liste d'excipients controversés tels que le BHT Butylhydroxytoluène dans certains médicaments à base de vitamine D, dioxyde de titane dans l'EUPHYTOSE © alors qu'il est désormais interdit dans toutes formes de denrées alimentaires etc.).


Le complément alimentaire


Les compléments alimentaires (ou supplément au sens anglo-saxon) sont des sources concentrées de nutriments ou d'autres substances à effet nutritionnel ou physiologique commercialisés sous forme « dosée » (par exemple : comprimés, gélules, liquides dosés) contrairement aux aliments fonctionnels.


Le complément alimentaire est aujourd’hui autorisé à comporter, dans un cadre bien précis :

  • Des nutriments ou des substances à but nutritionnel qui correspondent à une supplémentation nutritionnelle,

  • Des substances à but physiologique, des phytonutriments ou des préparations à base de plantes qui relèvent d’une supplémentation fonctionnelle.

Les compléments alimentaires sont destinés à corriger des carences nutritionnelles, à maintenir un apport adéquat de certains nutriments ou à soutenir des fonctions physiologiques spécifiques.


Ils ne sont pas des médicaments et en tant que tels ne peuvent exercer une action pharmacologique, immunologique ou métabolique.


Par conséquent, l'utilisation de compléments alimentaires n'est pas destinée à traiter ou à prévenir des maladies chez l'homme ou à modifier des fonctions physiologiques.


Dans l'Union Européenne UE, les compléments alimentaires sont réglementés comme des denrées alimentaires. Une législation harmonisée réglemente les vitamines et les minéraux, ainsi que les substances utilisées comme sources, qui peuvent être utilisées dans leur fabrication.


Pour les ingrédients autres que les vitamines et les minéraux, la Commission européenne a établi des règles harmonisées pour protéger les consommateurs contre les risques potentiels pour la santé et tient à jour une liste de substances connues ou suspectées d'avoir des effets néfastes sur la santé et dont l'utilisation est donc contrôlée.


Les denrées alimentaires relèvent du Code de la Consommation en ce qui concerne l’aliment fonctionnel ou le complément alimentaire (Dir 2002/46/CE) et de la DGCCRF pour la notification à l’autorité compétente. L'Agence Nationale de Sécurité sanitaire de l'Alimentation, de l'Environnement et du Travail (ANSES) est l'établissement public qui permet la recherche et l'évaluation scientifique de façon générale dans le domaine de l'alimentation.


La mise en œuvre du dispositif national de nutrivigilance a été confiée à l'ANSES en 2009 afin d’identifier rapidement d’éventuels effets indésirables. L'agence publiant régulièrement des alertes et mises en garde (exemple de la signalisation en juin 2022 de plusieurs hépatites en lien avec la consommation de compléments alimentaires à base de curcuma).


Les risques associés à la consommation de complémentaires alimentaires sont :

  • D’ordre allergique, ou de mauvaise tolérance y compris aux excipients,

  • Liés aux interactions médicamenteuses ou encore par effets de surcharge.

Du fait de l’évolution du marché et des nouvelles technologies, non seulement les laboratoires concepteurs ont connu une croissance exponentielle (y compris les laboratoires pharmaceutiques qui ont développé leur propre gamme de compléments alimentaires) mais les produits de supplémentation ont également indéniablement évolué.


D'une offre initiale en « nutraceutiques » (nutraceuticals) concentrant l'ensemble de l'aliment et/ou fidèle à la forme originelle de l’aliment, l’offre est devenue complexe mettant parfois en avant des formes innovantes voire préoccupantes sans le recul nécessaire à leur évaluation sur des périodes clés de la conception.


Progressivement des formes à marge thérapeutique faible (formes inorganiques de sélénium) hautement assimilables (formes microencapsulées ou liposomiales) ont vu le jour ou encore des compléments de qualité médiocre (contaminants, excipients controversés, nanoparticules, taux de péroxydation non contrôlé etc.).


Du fait de l'évolution technologique de la discipline, la formation des praticiens et professionnels de santé dans le domaine de la supplémentation est devenue incontournable.

 

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Sur le plan de l'éducation de la population générale susceptible d'auto-consommation, il serait opportun d’établir une grille d’ultratransformation applicable aux compléments alimentaires à l’image des produits alimentaires.


Il est possible de développer des compétences en supplémentation sur une échelle de recommandations sécuritaires oscillant entre le risque de déficit et risque d’excès mais incluant également le rapport bénéfice/risque.



La supplémentation : comment ?


Les bases sur lesquelles reposent les critères de mise en place d'une supplémentation


Il s'agit :

  • Des recommandations nutritionnelles, établies sur une base populationnelle (gestion du risque en santé publique),

  • Des valeurs cibles, par exemple pour compenser une déficience, afin de rétablir des niveaux plus conformes à une norme admise, ou des valeurs admises d’interprétation.

  • Pour la supplémentation fonctionnelle, la connaissance des mécanismes physiopathologiques et de biomarqueurs en lien avec la médecine environnementale (reflet d’une anomalie de fonctionnement d'un métabolisme avec l'étude des métabolomes) et/ou sur l’usage bien établi ou traditionnel en matière de préparations à base de plantes (conforme aux monographies de la Pharmacopée Européenne).

Dans tous les cas, les interventions dites nutritionnelles ou en phytonutriments font l’objet d’une quantité importante de revues scientifiques mais les conclusions et interprétations demeurent toujours réservées au regard des limites méthodologiques.


Il est donc important de former les professionnels à la supplémentation sur une base de données intégrées et avec en ligne de mire la bannière « primum non nocere ».


Les recommandations nutritionnelles


En France


En 2021, en coordination avec l’EFSA (European Food Safety Authority), l’ANSES a mis à jour les recommandations nutritionnelles pour la population française.


Ces valeurs constituent les références en vitamines et minéraux et remplacent les valeurs de 2016, pour les adultes en bonne santé, et les valeurs de 2001, pour les populations spécifiques (nourrissons, enfants, adolescents, femmes enceintes, femmes allaitantes et personnes âgées) (5).


Selon l'EFSA, « les termes généraux « valeurs nutritionnelles de référence » VNR (Dietary Reference Values DRVs) désignent un ensemble de valeurs alimentaires numériques qui guident les professionnels quant aux quantités de nutriments nécessaires pour maintenir l’équilibre alimentaire d’une personne ou d’un groupe de personnes par ailleurs en bonne santé ».


Les VNR ne sont pas des objectifs nutritionnels ou des recommandations pour les individus mais, toujours selon l'EFSA, "les VNR sont destinés aux personnes en bonne santé et ceux qui souffrent de maladies peuvent avoir des besoins différents".


En dehors des recommandations nutritionnelles établies (vitamines, minéraux, choline), la connaissance des apports alimentaires moyens dans une population donnée (donc sur la base de ses habitudes alimentaires culturelles) sert de référentiel (par exemple pour les acides aminés, peptides bioactifs ou substances telles le coenzyme Q10 ou les polyphénols).


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Vous connaissez ?


Le DRV Finder est un outil interactif qui donne un accès rapide et facile aux VNR de l'EFSA pour les nutriments. Il est destiné aux utilisateurs finaux de ces valeurs, tels que les professionnels de la nutrition et de la santé, les gestionnaires des risques, les décideurs politiques, les fabricants de produits alimentaires et les scientifiques (6).



Au niveau mondial


Le système d’informations nutritionnelles sur les vitamines et les minéraux (VMNIS Vitamin and Mineral Nutrition Information System), créé en 1991, répond à une des missions de l’OMS consistant à évaluer la situation des populations en matière de micronutriments, ainsi que l’impact des stratégies pour prévenir et combattre ce problème de santé publique.


Cela donne lieu à un ensemble de recommandations en termes de nutrition mais également de supplémentation (Guidelines Review Committee GRC, Handbook for guideline development) (7).


L’objectif de l’OMS concernant les supplémentations vise particulièrement la santé des populations en fonction des zones à risque :

  • Exemple du déficit majeur en vitamine A chez les femmes enceintes et les enfants dans les régions africaines et du Sud-Est asiatique,

  • Ou de l’iode, y compris en Europe et en France (8).

En pratique, sur notre territoire, les recommandations relatives à la supplémentation des populations en bonne santé se limitent souvent à des situations de prévention pour des populations à besoins spécifiques, notamment la femme enceinte et allaitante (9, 10, 11), l'enfant ou encore la personne âgée.



Quelques exemples de recommandations en matière de supplémentation


Ces recommandations sont encore limitées car il est complexe de mettre en oeuvre et d'exploiter des études d'interventions nutritionnelles.


Supplémentation en acide folique en périconception

Avant que la recommandation de supplémentation en acide folique à destination des femmes désireuses de concevoir un enfant ne se généralise, il aura fallu :

  • La reconnaissance d’un risque "suffisamment" préoccupant et répandu.

Par exemple, la prévalence des anomalies de fermeture du tube neural AFTN dans la population française est estimée à 1/1000 naissances.

  • Son lien avec une carence nutritionnelle à la prévalence non négligeable au sein de la population cible.

Par exemple, en lien avec la survenue d'AFTN, la prévalence du déficit en folates < 3 ng/mL des femmes en 18 à 49 ans de 13.4% selon l’étude ESTEBAN 2014-2016 (12).

  • Et la validation par des méta-analyses et études de cohortes démontrant un rapport efficacité/effets secondaires important.

Par exemple, l’acide folique administré en traitement périconceptionnel est efficace dans la prévention primaire des AFTN, réduction de plus de 80 % par la supplémentation systématique en acide folique au dosage de 0.4 mg/j pour les femmes sans antécédent particulier et de 5 mg/j pour les femmes à risque élevé, de 4 semaines avant la conception jusqu ‘à 8 semaines après celle-ci (13).

Malgré une prévention qui n’est pas totale du fait des facteurs génétiques et environnementaux intervenant également dans la survenue de ce type de malformations, la supplémentation en acide folique chez les femmes dans un projet de conception a été généralisée depuis plusieurs années.


Supplémentation en iode en périconception

Autre exemple au sein de cette population spécifique, malgré les nouveaux enjeux environnementaux appliqués au métabolisme de l’iode et de son rôle avéré dans les malformations neurodéveloppementales, malgré les enquêtes épidémiologiques classant la France comme une zone à risque de déficit, la supplémentation en iode ne jouit pas encore de recommandations systématiques en France en périconception.


Néanmoins si la supplémentation péri-conceptionnelle en iode ne fait pas partie des recommandations en obstétrique, elle est largement recommandée par les endocrinologues (14, 15, 16) après éviction d'un diagnostic de contre-indications.



Supplémentation en vitamine D pour une population pédiatrique

Suite à un travail des sociétés de pédiatrie avec volonté de simplification et d’alignement sur l’Europe, la recommandation pour la supplémentation en vitamine D pour une population pédiatrique (0 à 18 ans) en bonne santé, a confirmé le fait de privilégier le rythme quotidien de 400 à 800 UI de vitamine D3 de préférence, en évitant les mégadoses (de 50 000 UI à maximum 80 000 à 100 000 unités par prise en cas d’observance douteuse pour les plus de 2 ans à l’entrée et sortie de l’hiver et en l’absence de facteurs de risque).


Pour les plus de 2 ans, avec facteurs de risque (obésité, peau noire, absence d’exposition solaire, régime végan), la recommandation passe de 800 à 1600 UI/ jour (ou en cas d’observance douteuse à 50 000 UI toutes les 6 semaines ou 80 000 à 100 000 UI tous les trimestres) (17).


Par ailleurs, toute supplémentation au long cours suivant les références nutritionnelles devra faire l’objet d'un choix qualitatif et de bilans de contrôle afin de vérifier les valeurs biologiques cibles et d'éviter les excès.



Les valeurs biologiques cibles


Outre le suivi régulier des populations supplémentées en bonne santé, le recours à des outils biologiques comme référentiel constituent la seconde modalité de mise en place de la supplémentation.


Cela concerne les populations à risque d’excès ou de déficits :

  • Les professions à risques

Le guide Biotox édité par l’INRS, Institut National de Recherche et de Sécurité, permet d’identifier les biomarqueurs pertinents selon la nature de l’exposition et la signification des principales valeurs biologiques d’interprétation (VBI),

  • Les populations à comportements alimentaires restrictifs choisis

Par exemple vis-à-vis de la vitamine B12, nutriment exclusivement d'origine animale.

La supplémentation sur la base de valeurs biologiques cibles est particulièrement importante en France où les recommandations nutritionnelles par population spécifique tardent à être publiées pour les populations végétaliennes, veganes ou végétariennes.

Malgré les recommandations de supplémentation assorties du suivi des valeurs biologiques cibles (albumine, préalbumine, hémoglobine, ferritine, saturation en fer de la transferrine, vitamine D, calcémie, parathormone, vitamine A, B1, B9, B12, zinc et sélénium) à raison d'un rythme de 3 mois après l’opération, 1 à 2 fois la deuxième année, 1 fois par an ensuite, et durant toute la vie, le constat d’un mauvais suivi et de nombreuses carences post-chirurgicales est accablant (18, 19).


  • Les populations présentant un problème de santé

Par malassimilation (cholestase, crohn), polymorphisme génétique, iatrogénie, maladies chroniques etc.


Dans ce cas, la supplémentation s’inscrit dans un cadre de recommandations médicales qui correspondent à des valeurs biologiques cibles comprenant des limites de décision d'intervention évolutives et consultatives.


Des avis scientifiques à visée préventive ou thérapeutique avec des consensus d’experts conduisent à des recommandations officielles à l’échelle d’une population permettant une adaptation individuelle.


En fonction des pathologies ou des populations concernées, des recommandations en tant qu’apports et/ou en tant que cibles des marqueurs biologiques sont émises par des sociétés médicales faisant parfois partie d’un protocole national de diagnostic et de soins (PNDS).


Parmi les sociétés de référence citons :

  • La HAS (Haute Autorité de Santé),

  • Le CNGOF (Collège National des Gynécologues et Obstériciens Français),

  • La ESC (Société européenne de cardiologie),

  • Les SNFGE (Société Nationale Française de Gastro-Entérologie), SFDiabète, SFRhumato, SFDermato, SFPed…


Savez-vous comment sont établies les valeurs biologiques de vos laboratoires ? :


La détermination des valeurs de référence et des intervalles de référence mentionnés dans les comptes rendus d’examens biologiques repose sur les recommandations de l’International Federation of Clinical Chemistry and Laboratory Medicine (IFCC-LM).


Les valeurs de références sont représentatives d’une population homogène, supposée saine et sélectionnée sur la base de critères bien définis.


Reconnu comme le gold standard pour l’établissement des valeurs de référence, le protocole de l'IFCC (population homogène, établissement de critères d’exclusion etc.) n’est pas toujours réalisable en pratique courante dans les laboratoires de biologie médicale.


On parle alors de valeurs usuelles spécifiques du laboratoire à partir d'un panel de patients.


Les limites de références sont souvent utilisées en tant que limites de décision ou valeurs au dessous ou au dessus desquelles une décision thérapeutique ou de prise en charge du patient sera prise par le professionnel ou praticien de santé.


Mais ces limites de décision (ou intervention que ce soit pour une supplémentation ou une intervention médicamenteuse) peuvent différer de ces "limites de référence" inférieures ou supérieures.


Cette notion de limites de décision entraîne souvent une confusion avec les valeurs de référence bien qu’elles soient définies de manière différente.


Les limites de décision sont établies par des méthodes statistiques à partir de données cliniques ou épidémiologiques ou, le plus souvent, par consensus (20).


Par opposition, la notion de valeurs santé ne repose sur aucun avis partagés d'experts et encore moins de consensus scientifique.


Elles n’engagent que les personnalités, se présentant parfois comme des experts dans une discipline, qui les émettent (parfois avec pertinence car suffisamment documentés scientifiquement mais parfois sous couvert de conflits d’intérêt).


À noter que les valeurs biologiques cibles et marqueurs nutritionnels standards n’ont pas toujours le même degré de pertinence. Le système est imparfait mais il reste utile dans la mesure où l’outil demeure à sa juste place : un pont entre le bilan alimentaire et la clinique par confirmation et éviction d’hypothèses.

Enfin, il existe d’autres biomarqueurs y compris émergents dans la science des omiques qui permettent de développer une approche plus fonctionnelle à savoir le reflet de l’équation finale d’un métabolisme prenant en considération non seulement le statut nutritionnel mais également les facteurs génétiques et épigénétiques précoces ainsi que la composante environnementale.



NUTRITION ET SUPPLÉMENTATION : LE BILAN ACCABLANT DU MANQUE DE FORMATION


La nutrition moderne comprend aujourd’hui un levier de supplémentation nutritionnelle ou fonctionnelle. Le professionnel de santé, selon qu’il soit prescripteur ou non, sera amené à établir ses propres critères de sélection en matière de supplémentation (coût, qualité, biodisponibilité, tolérance, marge sécuritaire du bénéfice/risque, valeurs cibles etc.).


La formation dans ce domaine devient une nécessité pour tout professionnel et praticien de santé.


Dans de nombreux pays, il est recommandé aux médecins de prodiguer des soins nutritionnels aux patients afin d'améliorer les comportements alimentaires des individus et des populations.


En 2019, The Lancet présentait une revue systématique accablante qui visait à synthétiser de manière critique la littérature sur l'éducation nutritionnelle dispensée aux étudiants en médecine.


L’analyse de ces études a montré que la nutrition n'est pas suffisamment intégrée dans la formation médicale, quel que soit le pays, le milieu ou l'année de formation médicale.


Les lacunes en matière d'éducation nutritionnelle affectent les connaissances, les compétences et la confiance des étudiants pour mettre en œuvre les soins nutritionnels dans les soins aux patients (21).


En 2009, un rapport ministériel français faisait déjà ce constat (22) :

  • Concernant les diététiciens :

Une mission confiée au Pr Michel Krempf avait permis de confirmer la nécessité de l’évolution de la formation, aussi bien par rapport à l’évolution propre de la discipline que par rapport aux standards européens et internationaux de ces métiers.

Outre le fait que la durée actuelle de formation est insuffisante au regard de la complexification croissante des problèmes de nutrition, l’absence d’évolution risque de conduire inéluctablement à l’exclusion des diététiciens français des instances internationales.

  • Concernant les pharmaciens :

Une partie non négligeable de l’activité d’officine concerne la vente et le conseil autour de produits qui relèvent du champ de la nutrition.

Les pharmaciens constituent un relais qui, sans doute, a été sous-utilisé pour la diffusion et l’accompagnement des différents guides alimentaires du PNNS, mais également en ce qui concerne la supplémentation.

Force est de constater qu’une réflexion approfondie sur ces points, pour un enseignement d’une véritable « nutrition pharmaceutique » devrait être engagée avec la Commission pédagogique nationale des études pharmaceutiques.

Car les derniers indicateurs du secteur des compléments alimentaires affichent une croissance des ventes en pharmacies de +9.56 % en 2021 versus 2020 et de +16.25 % versus 2019 - source Synadiet 2021.


Et depuis, malgré cette évolution exponentielle du marché et l’importance pour cette profession de connaître les problèmes d’interférences (synergie ou antagonisme) avec le médicament tout en répondant à des interrogations toujours plus « enrichies » de la part des consommateurs, l’offre de formation initiale demeure insuffisante et souvent assortie de conflits d'intérêt dans la formation continue.


 

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POINTS À RETENIR SUR LA SUPPLÉMENTATION


  • La supplémentation est une des branches scientifiques de la nutrition qui permet, dans un cadre professionnel donné, de conseiller à un patient, des composés nutritionnels ou fonctionnels (composés bioactifs).

  • La supplémentation peut être apportée sous forme de médicaments (par un prescripteur) ou de complément alimentaire (appelé aussi supplément).

  • La supplémentation est fondée sur des recommandations nutritionnelles pour la population générale et/ou les populations spécifiques dans un objectif de maintien en bonne santé ainsi que sur l'objectivation de valeurs biologiques cibles en cas de situations à risque.

  • La supplémentation nécessite des connaissances de nutrition, mais également de biochimie, de biologie cellulaire, de physiologie et de santé environnementale.



Marie-I. LODATO

Formatrice en Santé environnementale, Nutraceutiques et Plantes médicinales

Co-Responsable pédagogique Oreka Formation

Co-Conceptrice de la Nutrition Fonctionnelle Adaptative



1- FAO Elements pouvant être inclus dans un projet de document directeur et de plan d’action sur la sécurité alimentaire universelle, « Rapport au Comité de la sécurité alimentaire mondiale », Document CFS : 95/4, Rome, 1995.

2- Lecerf, Jean-Michel. « Finalités de la recherche en nutrition. Perspectives à partir d’une réflexion historique. Commentaire », Sciences sociales et santé, vol. 34, no. 2, 2016, pp. 37-43.

3- Meldrum JM. What is nutritional medicine? Nutr Health. 1993;9(2):135-50. doi: 10.1177/026010609300900209.

4- https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2022/3/5/SSAH2137338D/jo/texte

5-ANSES. Les références nutritionnelles en vitamines et minéraux. Avis de l’ANSES. Rapport d’expertise collective. Mars 2021. 278p. Disponible sur : https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2018SA0238Ra.pdf

6- https://multimedia.efsa.europa.eu/drvs/index.htm

7- https://www.who.int/elena/about/fr/.

8- https://cordis.europa.eu/article/id/239956-first-european-map-on-iodine-deficiency/fr

9- OMS Recommandations de l’OMS concernant les soins anténatals pour que la grossesse soit une expérience positive. Supplémentation dans le but d’améliorer les issues maternelles et périnatales de la grossesse (OMS – 2016).

11- ANSES. Avis de l’ANSES relatif à l’actualisation des repères alimentaires du PNNS pour les femmes enceintes et allaitantes. Saisine 2017-SA-0141. 23 Décembre 2019. 53p.

12- Santé publique France. Etude de santé sur l'environnement, la biosurveillance, l'activité physique et la nutrition (Esteban 2014-2016). Volet Nutrition. Chapitre Dosages biologiques : vitamines et minéraux. Décembre 2019.

13- https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/ct031338.pdf

14- Supplémentation en iode pendant la grossesse https://www.who.int/elena/titles/iodine_pregnancy/fr/

15- WHO Reaching optimal iodine nutrition in pregnant and lactating women and young children: a joint statement by WHO and UNICEF.2007.

16- Luton D. RPC internationales de The Endocrine Society : thyroïde et grossesse - Management of thyroïd dysfunction during pregnancy and postpartum: an Endocrine Society clinical practice guideline. Mises à jour du CNGOF 2013.

17- file:///C:/Users/x751/Downloads/Vitamin-D-and-calcium-intakes-in-general-pediatric-populations-A-French-expert-consensus-paper-20-02-2022.pdf

18- https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2020-03/note_de_cadrage_obesite.pdf

19- Via MA, Mechanick JI. Nutritional and Micronutrient Care of Bariatric Surgery Patients: Current Evidence Update. Curr Obes Rep. 2017 Sep;6(3):286-296. doi: 10.1007/s13679-017-0271-x.

20- Henny J. Etablissement et validation des intervalles de référence au laboratoire de biologie médicale. Ann. Biol Clin 2011. 69 :229-37.

21- Crowley J, Ball L, Hiddink GJ. Nutrition in medical education: a systematic review. Lancet Planet Health. 2019 Sep;3(9):e379-e389. doi: 10.1016/S2542-5196(19)30171-8.

22- MISSION LA FORMATION A LA NUTRITION DES PROFESSIONNELS Rapport au Ministre de la santé Présenté par le Pr Ambroise MARTIN AVRIL 2009. https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_A_Martin_formation_nutrition.pdf.

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